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Research Guides United Nations Office at Geneva Library & Archives

Audio Guide: The Next Page - Transcripts

Welcome to the UN Library and Archives Geneva's Audio Research Guide! Here you'll find episodes from our own podcast, The Next Page, as well as podcasts and audio from or on the UN system and multilateralism.

Morrocan Ambassador Omar Zniber

by Yunshi Liang on 2022-06-10T10:41:35+02:00 in Development, Environment, Health, Human Rights, Humanitarian Affairs, International Relations, International relations., Member States, Peace & Security, Refugees, Social Affairs, Sustainable Development, United Nations | 0 Comments

 Alma Rinaldi

Bonjour à tous, je suis Alma Rinaldi, et bienvenus dans le Podcast The Next Page, destiné à faire avancer la conversation sur le multilatéralisme.
Cet épisode poursuit notre série de conversations avec des ambassadeurs auprès des Nations Unies à Genève, où nous explorons leurs expériences en tant que diplomates dans un système multilatéral, et ce que l'ONU signifie pour eux aujourd'hui.
Aujourd'hui, notre directeur à la Bibliothèque et aux Archives de l'ONU à Genève, Francesco Pisano, est rejoint par le représentant permanent et ambassadeur du Royaume du Maroc auprès de l'ONU à Genève et d'autres organisations internationales, Omar Zniber.
Le Royaume du Maroc a rejoint l'ONU en 1956. L'Ambassadeur Zniber raconte ce parcours, le rôle actuel du Maroc et ses rêves futurs au niveau multilatéral. Écoutons leur conversation.

 

 Francesco Pisano

Un cordial bonjour de la Bibliothèque et les Archives des Nations Unies à Genève. Aujourd'hui, dans notre podcast, The Next Page, nous avons le grand plaisir et l'honneur de recevoir le Représentant Permanent du Royaume du Maroc aux Nations Unies à Genève et d’autres organisations internationales, ici à Genève. J'ai invité ici dans notre studio Son Excellence l'Ambassadeur Omar Zniber. Omar Zniber est Ambassadeur du Royaume du Maroc aux Nations Unies depuis 2018. Il a fait ses études en droit international public à Rabat au Maroc et à Paris, où il a obtenu un master en droit international et même un doctorat dans la même matière.

Donc, il est un expert de droit publique international, des relations internationales, évidemment. Il a été en poste en tant qu'ambassadeur en Allemagne, en Autriche, en Slovaquie, en Slovénie. Il a aussi été représentant permanent de son pays aux organisations internationales à Vienne, où il y a encore des quartiers généraux des Nations Unies. Et il a été dans son passé de diplomate aussi à la tête de la direction de l'ONU et des organisations internationales de son ministère des Affaires étrangères.

Et plus, tout en postes à haute responsabilité de la diplomatie. Monsieur l'Ambassadeur, soyez le bienvenu, c'est un grand plaisir de vous avoir et la parole est à vous pour vous présenter vous-même. Comment vous êtes devenu représentant permanent de votre pays à l'ONU et qu'est-ce qui vous a motivé pour devenir un diplomate quand vous étiez jeune ?

Ambassador Omar Zniber

Merci beaucoup. Permettez-moi tout d'abord d'exprimer mon bonheur et mon plaisir d'être avec vous ce matin ici à la Bibliothèque des Nations Unies à Genève qui, je crois, symbolise la volonté des Nations Unies d'être unificateur des nations dans le monde. Ce sont des ressources culturelles, documentaires, très importantes et donc c'est un lieu des plus respectables.

Ce qui m'a motivé à devenir diplomate, c'est tout simplement mon cheminement, d'abord scolaire et aussi familial. Je suis issu d'une famille qui a contribué à la lutte pour l'indépendance de mon pays, durant le protectorat français. Et donc dans notre famille la question de la défense du pays était toujours au centre de nos discussions. Et puis aussi la nature du travail diplomatique qui m'a semblé être une voie intéressante pour contribuer, un tant soit peu, pour représenter mon propre pays, mais aussi renforcer la coopération entre les différents pays du monde, parce que nous avons des objectifs communs, et aujourd'hui plus que jamais, cela est très clair, donc c'est un peu ce qui m'a motivé dans ce cursus. Et puis, j'avais aussi dans mon entourage un certain nombre de personnes que je connaissais, qui travaillaient dans la diplomatie, et lorsque j'ai vu un peu combien ils étaient satisfaits de ce qu'ils faisaient, cela m'a convaincu davantage.

Francesco Pisano

Ça c'est donc une aspiration qui est née en vous déjà jeune, et c'est souvent le cas pour les diplomates qui ressentent ces sortes d'appels à la diplomatie.

Être diplomate pour un pays dont l'histoire est tellement longue, doit être aussi enthousiasmant, et c'est ce que je voulais offrir à nos auditeurs. Avant de rentrer dans notre matière du parcours du Maroc à l'ONU, j'aurais bien aimé que vous nous parliez de cette longue histoire fascinante de votre pays. Et pour ceux qui ne connaissent pas, j'imagine que c'est très très peu de monde qui n'a pas pu visiter votre beau pays, mais comment le présenteriez-vous et quels sont les moments clés de son histoire ?

Ambassador Omar Zniber

Entre autres choses qui m'ont conduit à devenir diplomate, c'est l'histoire des relations internationales du Maroc, une histoire extraordinairement riche que j'ai eu à rencontrer d'ailleurs durant mes études, parce que dans mon cursus universitaire par exemple, nous avions une matière qui s'appelait « l'histoire des relations internationales du Maroc ».

Le Maroc est un carrefour, un carrefour géographique, un carrefour historique et un carrefour civilisationnel. Géographique, parce que nous sommes à la rencontre de deux continents, nous sommes le point le plus avancé de l'Afrique vers l’Europe et donc le plus proche. Et cela a eu des conséquences au courant de notre histoire. Civilisationnel, parce que nous sommes à la rencontre de cultures. Nous sommes déjà un peuple brassé. Nous avons beaucoup considéré le Maroc comme un pays arabe, ce qui est effectivement vrai, mais notre population est tout à fait mixte, elle est diverse. Il y a des confluents amazigh, berbère, les populations originelles du Maroc - si vous voulez - et qui constituent une bonne part de la population d'ailleurs, mais aussi des confluents méditerranéens, des populations venues d'autres contrées de la péninsule arabique comme j'ai dit, mais aussi une communauté juive très ancienne et qui demeure présente dans le Maroc, et bien sûr, des enrichissements subsahariens très importants. C'est pour ça qu'aujourd'hui le Maroc, à sa manière, est un melting pot. Donc la deuxième chose c'est ces dimensions, ce carrefour civilisationnel.

Et j'ajouterai un carrefour historique, parce que le Maroc a été un peu au cœur de l'histoire, nous avons été dans le passé, comme les historiens le décrivent, un empire chérifien. Et nous sommes une vieille nation, un vieil État, un État constitué depuis plus de 12 siècles, au cours desquels se sont succédées de nombreuses dynasties et pour ne prendre que l'exemple de la dynastie actuelle, la dynastie alaouite qui gouverne le pays depuis bientôt quatre siècles, depuis 375 ans. Donc, c'est une vieille histoire enracinée, dans ce, si vous voulez, ce brassage de populations enracinées dans la culture des relations avec l'extérieur parce que je parlais d'empire, le Maroc avait des relations internationales établies. Je ne voudrais pas rentrer dans les détails, déjà avec les principautés de Venise, très anciennement, aussi avec les monarchies européennes et bien sûr dans son contour africain. Par exemple, si vous prenez les fameux manuscrits de Tumbuktu, un nombre d'entre eux sont rédigés par des Marocains qui visitaient la région.

Et puis le Maroc était un carrefour commercial, l'un des, si vous voulez, commerces les plus importants, je parle du 16e, 17e, 18e siècle, se faisait à travers le Maroc. C'était le commerce transsaharien qui faisait venir par caravane les produits de l'Afrique subsaharienne, très prisés déjà en termes de condiment, enfin, diverses choses, vous voyez ? Et cela a aussi contribué à la Constitution de notre pays, voilà.

Francesco Pisano

Et justement alors, le Maroc dans son positionnement au sein de l'Afrique, j'aimerais qu'on passe quelques minutes là-dessus. Quelle est la place du Maroc dans le continent africain, du point de vue politique et stratégique ? Qu'est-ce qu'on peut dire aussi de ses relations avec les autres pays de ce continent énorme, qui vous compte 54 ?

 Ambassador Omar Zniber

Comme vous le savez, l'Afrique est un continent qui aspire à l'unité. Et dès après les indépendances, les pays africains, prenant en considération l'énorme tâche qui les attendait, ont décidé d'unir leurs efforts en commun au sein d'une organisation continentale pour faire le maximum de coopération, de solidarité et de partenariat.

Or, le Maroc a abrité la première conférence, en 1961, qui est à l'origine de la création de l'Organisation de l'unité africaine. Et c'était Sa Majesté le Roi, Mohamed V, qui, en date du 4 janvier 1961 a appelé à cette conférence qui a donné l'impulsion pour la création de l'Organisation de l'unité africaine elle-même en 1963 à Addis Abeba. Donc, ce rôle du Maroc historiquement avec à la tête le chef de l'État lui-même qui s'implique, Mohamed V, le Roi Mohamed V, est entouré d'une aura exceptionnelle. C'est un roi fondateur, n'est-ce pas ? C'est lui qui a libéré le Maroc du protectorat avec les moyens les plus pacifiques, il faut le souligner. Avec énormément d'entrain, mais aussi une grande détermination. N'oublions pas qu'il a, par exemple, été exilé avec sa famille du fait qu'il prenait fait et cause, bien sûr, pour l'indépendance de son pays. Mais tout cela s'est fait, heureusement, s'est produit et s'est déroulé dans, comme je l'ai dit, d'une manière pacifique et intelligente.

Et Sa Majesté Mohamad V a voulu dès le départ imprégner la politique extérieure du Maroc de ce pan- africanisme auquel nous sommes très attachés. Donc c'était déjà une première étape. Les choses ont évolué de façon telle que le Maroc a eu en quelque sorte, si vous voulez, un différend fondamental avec le secrétariat de l'Organisation de l'Unité africaine en 1984, en particulier à cause de l'affaire du Sahara.

À l'époque, le secrétaire général qui en fait, à haut responsable administratif, avait pris une décision contraire aux intérêts fondamentaux du Maroc concernant son intégrité territoriale. Cela n'a pas empêché le Maroc de renouer avec l'Organisation de l'Unité africaine de manière éclatante, n'est-ce pas ? Et le retour du Maroc s'est aussi déroulé de façon exceptionnelle par un discours de Sa Majesté le Roi Mohammed VI actuellement, qui de mon point de vue, regroupe, contient, l'essence même la philosophie même de nos relations avec l'Afrique et en tant que pays africains. C’est-à-dire, encore une fois, la solidarité, compter sur soi. On utilisait toutes les énergies intra-africaines en coopération avec bien sûr les autres partenaires de l'Afrique qui sont, comme vous le savez, nombreux et diversifiés. Mais d'abord, compter sur nous-mêmes, c'est ça un peu la philosophie du Maroc si vous voulez. Pourquoi ? Parce que l'Afrique regorge de potentiel.

Les gens ne parlent souvent que, par exemple, du potentiel des ressources de matières premières, ce qui est important naturellement, mais le potentiel de l'Afrique d'abord, c'est dans ses capacités humaines. C'est un continent jeune en termes démographique. C'est un continent qui aspire à beaucoup de développement. C'est un continent aussi qui, sur le camp, comme vous le disiez tout à l'heure, a des ressources exceptionnelles surtout, et je veux bien le souligner, en matière de possibilités de développement agricole, parce que, comme chacun sait, la démographie mondiale se développe, voir même explose. Apparemment, nous allons avoir plus de 2 milliards d'habitants sur notre globe dans les 30 prochaines années, faudra bien les nourrir, il faudra bien s'en occuper. Pour une bonne partie d'ailleurs, en Afrique elle-même, sur le continent africain pardon. Donc, ces éléments-là font que le Maroc privilégie la coopération Sud-Sud, privilégie l'investissement Sud-Sud, et cela pas uniquement en termes de discours. Si l'on veut bien analyser comment le Maroc s'est impliqué économiquement, socialement, aujourd'hui en Afrique, on constatera que dans des secteurs clés - l'infrastructure, les communications, la finance, la banque et beaucoup d'autres, si vous voulez secteurs, les entreprises marocaines sont parmi les plus actives sur le continent africain.

Le Royaume du Maroc est le premier investisseur dans l'Afrique de l'Ouest, privé, investisseur privé, au niveau mondial. Je le souligne. Et le secteur privé marocain est le deuxième secteur privé en termes d'investissement sur le continent africain, africain, le secteur privé africain après celui de l'Afrique du Sud.

Je crois que cela est très important à retenir parce que c'est ça ce qui compte aujourd'hui, c'est répondre aux aspirations des populations, répondre aux aspirations des jeunes, quelque chose de très significatif pour exprimer la volonté politique qui existe derrière cette politique. Derrière, si vous voulez, cette volonté, c'est le fait que Sa Majesté le Roi Mohammed VI a fait 40 déplacements sur le continent africain, avec à la clé des signatures très importantes d'accords, qui sont aujourd'hui mises en œuvre de façon concrète. J'ajoute à cela naturellement la solidarité qu’exprime le Maroc, avec ses pays frères africains, en termes d'aide humanitaire, en termes de politique de coopération au développement, en termes de formation des jeunes. Aujourd'hui, les universités marocaines abritent plus de 25000 étudiants subsahariens, cela sur un processus continu depuis longtemps, avec pour l'essentiel des bourses marocaines.

Nos moyens sont limités mais il y a des priorités. Pour nous, cela constitue une priorité aujourd'hui, beaucoup de cadres africains, compétents, brillants, ont été formés chez eux au Maroc et exercent leur responsabilité dans leur propre pays. Voilà. Donc si vous voulez, c'est une politique multiforme, diversifiée, accordant à notre continent une priorité fondamentale. Le Maroc exerce beaucoup de responsabilités sur des dossiers cruciaux pour l'Afrique, par exemple, la question de la migration. Faut savoir que Sa Majesté le Roi Mohammed VI est le porte-parole de l'Afrique sur la question de la migration. Dans quelques jours, je ne veux pas contextualiser ce que je suis en train de dire, se tiendra le sommet Europe, Union européenne, Afrique et la question de la migration sera au cœur des débats. Je pense, effectivement, ça va se passer dans deux semaines, peut-être un peu moins même que deux semaines.

Et le Maroc étant donné que c'est un dossier qui ne concerne pas que l'Afrique, mais le monde dans sa globalité, vous voyez, a toujours donné cette priorité à son penchant africain, à son origine africaine. Lorsque nous avons organisé, par exemple la COP 22, cette grande conférence qui s'est tenue à Marrakech, qui a réuni l'ensemble des États du monde avec tous les acteurs, les ONG, les institutions internationales, etc., le Maroc a consacré une grande partie de cette conférence à l'Afrique avec, en particulier, le développement agricole africain dans la perspective des changements climatiques. Parce que même si l'Afrique n'a aucune responsabilité directe, ou en tout cas très minime pour ce qui concerne les changements climatiques qui nous affectent aujourd'hui, c'est le continent le plus affecté. Ça, cela doit être pris en considération pour préparer les générations futures à vivre.  Bon, il y a encore beaucoup d'autres éléments. Moi je pense ceux que j'ai présenté ici sont suffisants pour exprimer combien nous sommes attachés à notre continent, combien nous sommes aussi préoccupés, parce qu'il faut dire les choses comme elles sont, par le devenir du continent africain qui fait face à d'énormes défis.

Je voudrais juste donner un exemple illustratif, la question de l'énergie. L'Afrique aujourd'hui a besoin d'énergie, ses besoins en énergie sont énormes. Il y a qu'à voir, par exemple les niveaux de consommation d'énergie en Afrique. Parfois, les moyennes représentent moins de 2 ou 3% par rapport à certains pays de l'OCDE. Il faut, je pense toujours garder ça à l'esprit si on veut faire la bonne analyse. Et sans énergie, on ne peut pas développer, on ne peut pas faire de développement économique. En Afrique de l'Ouest jusqu' au jour d'aujourd'hui l'agriculture constitue la colonne vertébrale de l'économie du pays, un peu comme au Maroc, d'ailleurs. Très bien, alors s'il n'y a pas d'énergie, on ne peut pas faire de stockage. S'il n'y a pas de logistique pour le transport des récoltes, les récoltes sont perdues en bonne partie, en tout cas. Donc, vous voyez, alors c'est pour cela que la question de l'énergie est portée aussi sur le continent africain par le Maroc comme une priorité stratégique absolue.

Nous avons un accord avec le Nigeria, pour construire le gazoduc qui partira du Nigeria, qui viendra vers le manque, mais le plus important, c'est qu'il traversera 15 ou 16 pays sur sa route pour fournir du gaz. Mais encore de manière plus ambitieuse, le Maroc, vous le savez très certainement en termes d'exemplarité sur les énergies renouvelables et il partage son expérience avec les pays africains. Nous formons sur place aujourd'hui dans nos instituts qui s'occupent des énergies renouvelables beaucoup d'Africains, mais en même temps, on est prêt à investir dans ce secteur vital, essentiel, d'autant plus que l'Afrique a un potentiel aussi dans ce domaine.

Donc, voilà, un peu si vous voulez, nous sommes un peu en plein dans notre rôle de développement au niveau africain, de solidarité, de partenariat, de coopération. Mais nous nous estimons comme étant un des hubs d’entrée en Afrique. La politique de la logistique qui est actuellement construite au Maroc reflète cela, illustre cela, de la manière la plus claire et la plus honnête. Nous venons de parachever la construction de ce qu'on appelle la double voie chez nous, c'est-à-dire une route qui va d'Agadir jusqu’en, pratiquement, en Mauritanie.

Elle arrive maintenant à Dakhla, la ville Dakhla au Sud du Maroc, elle ira jusqu'au Mauritanie. Il y a un flux commercial qui commence à se développer par l'intermédiaire de transport routier qui est très significatif. Nous sommes en train de construire le port en mer, si vous voulez, en eau profonde, à Dakhla, qui est destiné pour être un pivot du commerce vers le continent africain. Et bien sûr, j'en terminerai par là. La compagnie aérienne marocaine est l'une des compagnies qui dessert le mieux de manière interne le continent africain, si je ne m'abuse, la Royal Air Maroc visite 35 aéroports en Afrique. C'est une question de désenclavement là aussi qui parce qu'il faut en être conscient. Certaines possibilités de faire des échanges exigent de la connectivité et nous travaillons aussi sur ce plan-là. C'est pour nous des choses fondamentales.

Francesco Pisano

Donc un Maroc, complètement pays quasiment charnière, dans un contexte continental en plein essor, un pays qui comprend très bien les enjeux stratégiques de notre époque, mais aussi le futur, l'énergie, la migration et d'autres. Donc avec une bienveillance dans les relations internationales, effectivement, qui lui vient aussi en partie de son histoire d'évolution, plutôt que de révolution, de mise en accord autour de soi plutôt que de guerre des violences. Ça, c'est très clair, monsieur l’Ambassadeur, ça ajoute beaucoup à l'image que nous avons du Maroc.

Je voulais en venir aussi au parcours du Maroc, au sein des Nations Unies. Nous sommes aujourd'hui ici au siège des Nations Unies à Genève. C'est là que vous travaillez en représentant de votre pays et du Royaume du Maroc, et le Maroc est un pays membre des Nations Unies depuis 1956, donc c'est un parcours historique. C'est un parcours qui est long. Et je voulais vous demander d'entrée, quel bilan peut-on faire aujourd'hui, de l'expérience du Maroc à l'ONU ?

 Ambassador Omar Zniber

Un bilan éloquent, cher monsieur, parce que nous estimons, comme tous les pays du monde, que les Nations Unies ont été créées en quelque sorte, renouvelées en 1945 par les accords de San Francisco à Dumbarton Oaks, pour maintenir la paix et la sécurité dans le monde. Ça c'est la mission prioritaire des Nations Unies. Et à cet égard, nul besoin de retracer la contribution du Maroc dans les opérations de maintien de la paix par exemple. 60 000 soldats marocains y ont déjà participé, y compris d'ailleurs des femmes soldats marocaines. Depuis la décision prise par Sa Majesté le Roi Mohammed VI en 2017 de faire participer aussi les soldates femmes marocaines, les officiers femmes marocaines, à ces opérations, nous avons contribué à de nombreuses opérations de maintien de la paix et nous continuons à le faire aujourd'hui, même en République démocratique du Congo, en Centrafrique et ailleurs.

L'armée marocaine a vraiment présenté beaucoup de sacrifices et pas uniquement sur le continent africain. Nous avons aussi contribué par exemple, au maintien de la paix au Kosovo. Et je ne veux pas rentrer dans le détail, mais cela est expressif et je crois que c'est très apprécié par les Nations Unies, le Maroc en termes, si vous voulez de volume de contribution dans nos régions, la région arabe, la région africaine, nous sommes le deuxième pays arabe en termes de contribution aux opérations de maintien de la paix, et nous sommes le sixième pays en Afrique, aussi. Et ce depuis très longtemps, depuis déjà les premiers conflits au Congo, au Biafra aussi au Nigeria, vous voyez depuis les années 60, le Maroc ayant à peine recouvert en quelque sorte son indépendance, avait mis à contribution son armée, nous avons contribué en Somalie aussi, donc cela est très important.

La deuxième chose, je pense, parmi les piliers, les piliers des Nations Unies, c'est l'action humanitaire. Et à cet égard, là aussi le Maroc, en dépit, j'allais dire, de ses moyens relativement limités, se montre extraordinairement volontaire et généreux. Les opérations humanitaires du Maroc sont très nombreuses. Aujourd'hui même, il y a des hôpitaux, si vous voulez de campagne, qui ont été installées par la volonté des autorités marocaines et en particulier celle de Sa Majesté le Roi. J'insiste, parce que ce sont des opérations qui sont supervisées personnellement. D'ailleurs, Sa Majesté, dans certains de ses déplacements, a visité ces hôpitaux de campagne, tels qu'ils existent aujourd'hui en Jordanie, à Gaza, mais aussi en Afrique, vous voyez ? Dans différentes régions de l'Afrique, donc voilà. Et puis l'action humanitaire, j'aimerais juste vous renvoyer à l'une des plus récentes, les plus significatives. Après l'éclatement de la pandémie que nous subissons actuellement, le Maroc avait mené une opération, un véritable pont aérien vers plus de 20 pays africains offrant du matériel médical et du matériel de protection contre la pandémie. Vous voyez ? Ce sont des opérations qui se font de manière, si vous voulez, j'allais dire, non pas périodiques mais de manière soutenue, permanente. Nous agissons à chaque fois que la demande est là parfois pour venir en aide suite à des catastrophes naturelles, parfois de manière circonstancielle. Mais le Maroc est convaincu que l'action humanitaire est fondamentale parce qu'il s'agit tout simplement, comme son nom l'indique, d'exprimer aussi notre humanité à travers cela et notre solidarité. Mais cette action ne se confine pas uniquement en Afrique. Nous apportons notre aide aussi en Amérique centrale, à Haïti par exemple, en Amérique latine, au Paraguay, par exemple, et aussi dans d'autres régions du monde. Cela, je pense, est assez expressif.

En dehors de ces aspects-là, il y a une présence j'allais dire institutionnelle du Maroc dans les arcanes des Nations Unies. Je vais me limiter à la période récente, à commencer par Genève. Par exemple, ces 2 ou 3 dernières années, nous avons exercé des responsabilités ici à Genève. Le Maroc a présidé les assemblées générales de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. Il a présidé la Conférence internationale du travail etc. Au niveau de New York, le Maroc a présidé le segment humanitaire de l'ECOSOC. Il a été vice-président de la quatrième Commission, qui est importante. Et puis il a facilité un certain nombre de processus en particulier celui sur les organes des traités de droits de l'homme. C'était l'année dernière. Également à Vienne, vous avez-vous même cité tout à l'heure le fait que Vienne est un headquarter aussi des Nations Unies. Nous présidons actuellement le groupe des 77 et nous avons présidé l'année dernière la Conférence générale de l'Aya. Je parle de ces 2 ou 3 dernières années. Je peux remonter très loin. Je citais le fait que nous avons accueilli la COP 22, par exemple. C'était en 2015, je crois, et nous avons surtout accueilli la conférence d'adoption du pacte global sur la migration, avec la présence de tous les États membres des Nations Unies, et des chefs d'État, c'était en décembre 2018. Ce sont des conférences si vous voulez d'une ampleur exceptionnelle et nous continuons à le faire. Nous avons dans le projet de recevoir un certain nombre d'autres événements de première importance qui ont déjà été annoncés, mais qui ont été un peu si vous voulez dérangés par l'impact de la COVID, je fais référence en particulier au fait que le Maroc va abriter le sommet du forum de l'Alliance des civilisations et là c'est aussi un secteur que le Maroc met en avant dans ses activités en USD yen parce que nous sommes pour le dialogue des cultures. Le Maroc est connu pour aussi, je ne veux pas enjoliver les choses : ce sont des réalités, un pays qui promeut la coexistence, et qui promeut le vivre-ensemble, et qui promeut parce qu'il a en même temps des capacités.

Je parlais tout à l'heure du fait que nous sommes un melting pot en termes de population, mais ça se reflète aussi dans nos politiques extérieures, dans notre comportement, dans notre vouloir si vous voulez d'enrichir, de s'enrichir mutuellement Et donc, c'est pour cela que Sa Majesté le Roi en personne a pris la décision que le prochain forum sur l'Alliance des civilisations se tiendra chez nous, dans cette ville si expressive de l'enracinement culturel et civilisationnel et aussi de l'échange qui est la ville de Fès, qui abrite l'une des plus anciennes universités, sinon la plus ancienne université dans le monde, l’université Al Quaraouiyine. Et c'est pour cela que je crois, [il] faut résumer en quelque sorte notre action au niveau des Nations Unies, nous sommes en quelque sorte un militant pour les Nations Unies, voilà, nous y croyons. La diplomatie marocaine a toujours donné la priorité au soutien, au multilatéralisme, comme je viens de le dépeindre en quelque sorte, ce matin. C'est très important parce que, comme on le voit d'ailleurs aujourd'hui, la question du COVID, les changements climatiques, la gouvernance de la migration, et aussi un certain nombre d'autres sujets dont on ne parle pas assez de notre point de vue, la lutte contre la criminalité transnationale; cela nécessite absolument de la coopération multilatérale, et nous respectons parfaitement le principe de souveraineté des États. Mais il se trouve aujourd'hui que le déséquilibre auquel nous faisons face nécessite une coopération de tous. Je ne voudrais pas terminer ce cheminement, ce bilan du Maroc, même très relatif et très succinct au niveau des Nations Unies, sans parler de la dimension humaine et en particulier de la question des droits de l'homme. Là aussi, il n'y a qu'à voir aujourd'hui la contribution du Maroc, j'ai parlé des organes de traités à travers nos différents experts, à travers nos différentes institutions. Il y a un dialogue connu maintenant qui est très important. Il y a notre contribution au niveau du Conseil des droits de l'homme ici à Genève qui est significatif, en coopération avec tous les intervenants, tous les acteurs, y compris à travers la société civile bien sûr, dont nous apprécions beaucoup aussi la valeur et la contribution au soutien au travail des Nations Unies.

Et je terminerai par le dernier pilier des Nations Unies, qui est l'agenda du développement économique. Croyez-le bien, au moment les personnes comme représentants du Royaume du Maroc ici à Genève, il n'y a pas une journée où je n'insiste pas sur cet agenda, qu'il s'agisse même d'organisations qui ne relèvent pas directement des Nations Unies comme l'Organisation mondiale du commerce, mais aussi l’agenda de développement économique est fondamental parce que les Nations Unies ont été créées, comme je l'ai souligné auparavant pour maintenir la paix et la sécurité. La paix et la sécurité, elle a un corollaire, c'est le développement, le développement économique aussi.

Francesco Pisano

Justement, restons un instant sous l'agenda pour le développement durable. Parce que dans ces grandes références, points de référence pour la coopération internationale reste quand même l'Agenda 2030, [qui] reste quand même un événement assez unique. C'est-à-dire, c'est une stratégie globale qui a été construite avec un système novateur où il y avait bien sûr le gouvernement, bien sûr les pays membres, mais aussi la société civile, aussi nombre d’autres organisations, entités qui vont participer à cette vision du futur.

Et je voulais votre avis d'Ambassadeur, de diplomate, mais aussi de représentant permanent quand vous regardez l'agenda. Donc, 2030, en sachant que l'Afrique s’est dotée aussi d'une Agenda 2063, donc quelque chose qui va au-delà de la vision, mais qui intègre bien sûr les piliers de l'Agenda 2030. Quel est le futur de l'Afrique, de votre point de vue, dans un contexte agenda 2030 qui nous donne des objectifs assez clairs ? Nous voulons un monde, il est bien décrit ce monde dans la déclaration d'intention de l'Agenda 2030. C'est un monde qui fait rêver, qui correspond à mon sens, bien même au-delà du monde que nos pères fondateurs de Saint Francisco entrevoyaient pour eux-[mêmes].

Ambassador Omar Zniber

Oui, je suis tout à fait d'accord que c'est un objectif fondamental, essentiel et qui a été bien élaboré, bien structuré comme vous l'avez dit, l'éducation, la santé, l'égalité homme-femme, le développement durable. Je ne veux pas décliner tous les objectifs qui sont bien connus, comme vous l'avez dit.

Reste à savoir comment parvenir, comme chacun sait, il y a des préoccupations qui se font entendre au jour d'aujourd'hui. Bien même avant le déclenchement de la pandémie, qui a eu malheureusement un impact très fort sur les pays en développement concernés en premier par les ODD, les objectifs de développement durable. Certains considèrent que les efforts nécessaires à consentir pour réaliser ces objectifs en forme 2030 sont très en dessous, actuellement, de ce qu’ils devraient l'être. Je ne voudrais pas faire parler Monsieur le Secrétaire Général des Nations Unies sans en avoir la certitude. Mais je pense bien que dans l'une de ses déclarations, il a dit, nous sommes menacés de ne même pas parvenir à 50% dans la réalisation subjective. En 2030, au rythme actuel, ne soyons pas pessimistes.

Pour l'Afrique, pour répondre très précisément à votre question, je pense, avec, encore une fois, la modeste expérience et la pratique qu'on a sur ces dossiers, qu'il y a un obstacle fondamental à enjamber, c'est le problème du financement, l'accès au financement. Au jour d’aujourd'hui, pour la majeure partie des États de l'Afrique en particulier l'Afrique subsaharienne, je le souligne fortement. L'accès aux marché financier, international, privé, est presque, j'allais dire, prohibitif. Avec les taux qui s'appliquent pour les économies de ces pays-là en même temps que on le voit pour une autre catégorie des pays, ces taux sont presque négatifs. Mais si vous êtes un pays subsaharien, il en existe aussi dans d'autres régions du monde. Ces taux peuvent aller jusqu'à 10%, c'est pour ça que j'ai dit qu'ils sont prohibitifs. Je ne parle pas de la coopération bilatérale ou bien de la coopération institutionnelle ou bien de l'aide de la coopération au développement. Je te parle, je suis pays subsaharien, je suis entreprise subsaharienne, je veux accéder au marché financier international privé, voilà les ratios qu'on m'applique. Si je veux développer davantage, si vous voulez mon portefeuille, pour satisfaire à ces besoins. Aujourd'hui des investissements massifs comme la pandémie vient de le démontrer, sont nécessaires sur le continent africain, à commencer par la production des produits médicaux sur le continent africain lui-même. C'est aujourd'hui, ce sont des termes qu'on peut me reprocher le fait qui ne sont pas diplomatiques, mais je crois parfois, ce sont des cris du cœur. C'est scandaleux que l'Afrique ait besoin de plus de 90% des produits médicaux en importation pour un continent dont la population est ce qu'elle est, et elle va devenir ce qu'elle deviendra. Vous voyez, je ne prends que cet exemple. Et aussi, en matière d'éducation, parce que les populations africaines sont très jeunes. L'éducation, c'est devenu extrêmement onéreux, coûteux, donc l'accès au financement, je pense, est l'une des clés les plus importantes pour la réalisation des ODD parce qu'il faudra des moyens exceptionnels. L'agenda de développement, c'est aussi le volet commercial et l'action marché en particulier la question, l'action du marché, les pays africains, y compris d'ailleurs, le mien, le Royaume du Maroc, parfois, on a d'énormes difficultés pour accéder au marché de concurrentielle.

Donc là aussi il y a la question si vous voulez, ça c'est très connu, ici à Genève, on en discute dans plusieurs cénacles, la question des investissements, pardon des subventions, qui pervertissent tout le système du commerce. Vous voyez cela à quoi je fais allusion ? Donc, ceci dépend de cela. La réalisation des objectifs durables du développement dépend aussi de cela. Je crois qu'il faut une approche globale. Nous comptons beaucoup aussi sur la coopération intra-africaine dans la réalisation de ces ODD et je crois que le continent africain se structure de mieux en mieux pour autant que les questions géopolitiques, les conflits, ne viennent pas perturber ces efforts, parce que malheureusement, ces efforts très souvent sont perturbés par l'insécurité que génèrent les conflits si vous voulez, par le manque de visibilité et ce qui impacte, l'attractivité aussi, il faut le dire. L'attractivité du continent par rapport aux investisseurs globaux, aux investisseurs étrangers, voilà. Et je crois aussi, c'est un élément qu'on ne peut ignorer, que l'Afrique a besoin d'une aide massive, d'un soutien massif pour faire face au changement climatique. Je l'ai déjà fait référence tout à l'heure, mais il n'y a qu'à entendre les experts, les scientifiques qui, si vous voulez, envisagent des scénarios assez apeurant en termes de déplacement des populations, en termes de mobilité pour des raisons de sécheresse, pour des raisons, si vous voulez d'évènements météorologiques exceptionnels et tout cela, de désertification. Ça, ça concerne notre pays aussi. Je peux vous en parler un peu dans le détail, si vous voulez. Et tous ces bouleversements, nous devrions nous préparer déjà, des efforts sont faits bien sûr, mais je pense que nous devrions nous préparer avec l'aide des Nations Unies. Pas plus tard, je pense qu'il y a une dizaine de journées, Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies, Monsieur Antonio Guterres, a fait une déclaration, des plus, j'allais dire, expressives. Disons que le défi le plus important en face de la communauté internationale, c'est celui des changements climatiques. Voilà, je pense qu'il n'y a plus lieu de scepticisme si vous voulez, si on veut traiter ces questions avec le sérieux nécessaire.

Francesco Pisano

Revenons à la coopération internationale. Vous évoquiez tout à l'heure l'importance de coopérer, de collaborer, la coopération internationale qui nous retient aussi des conflits, etc. Donc à la base de tout ça, il y a le multilatéralisme. Vous êtes ici dans la bibliothèque la plus grande sur, justement, ce sujet, le multilatéralisme, et à l'Ambassadeur que vous êtes, j'aimerais poser la question: comment faire évoluer, comment même protéger le multilatéralisme date une époque où d'un côté, on est dans un grand changement, on est clairement dans une époque, en parlant de civilisations humaines, de transition, et au même moment on voit se développer ces tendances, je dirais, avant de nationalistes, je les appellerai plutôt anti-multilatéralistes, donc la croyance que seul j'irai plus rapidement vers mon but qu’ ensemble.

On sait très bien que d'un nombre de disciplines scientifiques et du savoir, cela n'est pas vrai, mais en relations internationales, le multilatéralisme se trouve aujourd'hui sous pression pour dire le moins. Quel est votre avis là-dessus ?

Ambassador Omar Zniber

Oui, vous savez vraiment, l’expérience m'amène à dire ce qui suit. Ce que nous constatons, y compris ici à Genève, au jour d'aujourd'hui, dans nos discussions dans les différentes organisations internationales, les différentes, si vous voulez, institutions, une politisation excessive des débats. Et cela est contraire au développement du multilatéralisme, une polarisation des débats.

Et donc, le multilatéralisme, c'est celui de se dire, nous avons des intérêts communs, nous avons des défis communs, nous avons à régler des menaces communes et dès lors, ne pas faire prévaloir toujours et à tout prix ses propres intérêts. Avoir une diplomatie multilatérale, par définition, signifie qu'un État donné est là aussi pour travailler pour le bien commun, et avoir le sens du compromis et avoir le sens de la mesure. Et pour ne pas rester que dans des considérations si vous voulez, théoriques, on peut prendre des cas précis, sur lesquels nous travaillons actuellement.

Sur la question des pêcheries, les derniers rapports au niveau mondial, qui évaluent le patrimoine halieutique global, estiment que 50% de ce patrimoine est menacé de disparition à cause de la surpêche et de la pêche illégale. Donc voilà, la question est très simple, est ce qu'on va empêcher les générations futures de profiter de ce patrimoine ? Sachant qu'au jour d'aujourd'hui encore une fois, selon, les statistiques internationales près de 5000 millions de personnes sur notre globe dépendent des pêcheries, directement ou indirectement, leur vie et leur quotidien, leurs revenus.

Donc à un certain moment, il faut faire prévaloir, et d'ailleurs, ça figure dans les objectifs de développement durable auxquels nous faisons allusion tout à l'heure. Un certain moment, il faut que tout soit mis sur la table et discuté. Nous avons un objectif, on est en train de négocier un traité, il faut qu'il soit crédible et ne pas faire prévaloir uniquement les intérêts des uns et des autres.  Ceci dit, donc, la première des choses de mon point de vue pour le développement du multilatéralisme dans le sens souhaité, c'est la non-politisation excessive des débats.

Je pense que la deuxième chose qui me semble aussi être très importante dans le multilatéral, c'est d'éviter de créer des liens entre les différents sujets, c'est-à-dire que traiter, sujet par sujet, selon son propre mérite. Si on commence à établir des liens entre les sujets des pêcheries et d'autres sujets liés aux vaccins ou d'autres sujets liés à d'autres domaines du développement économique, cela complique la tâche de manière très forte. Donc éviter de créer ces liens, perturbateurs et qui créent des difficultés encore plus graves pour gérer ces sujets.

Le troixième chemin que nous devrions emprunter, c'est d’essayer de créer des ponts les plus solides possibles entre les différents groupes d'appartenance au sein des Nations Unies, ne pas rester figés. Les groupes sont importants, les groupes géographiques. Je fais partie de l'Afrique, je suis là aussi pour, comme je le disais tout à l'heure, être le porte-voix de l'Afrique et donner toute ma force pour que l'Afrique contribue au mieux, et soit aussi le réceptacle au mieux des avantages du multilatéralisme. Mais en même temps je dois prendre en considération le point de vue des autres, et donc rester figé dans cette appartenance régionale ou politique, perturbe parfois le souhait de rechercher les résultats au niveau …

Vous le savez, il y a des efforts qui sont faits aujourd'hui, beaucoup d'efforts, en particulier par les structures internes des Nations Unies, les hauts responsables des Nations Unies, le Secrétariat des Nations Unies sont là et aussi, je pense que c'est un élément fondamental, faire confiance à l'institutionnel des Nations Unies, au Secrétariat des Nations Unies. Moi-même je suis Ambassadeur ici à Genève, un jour ou l'autre, proche ou lointain, je ne sais pas, je vais devoir partir. Mais le Secrétariat reste ici, et le Secrétariat, c'est l'expérience qui reste ici, c'est la longue expérience, c'est le savoir, et encore une fois, c'est l'expertise et c'est la volonté de rapprocher le point de vue de tout le monde et d'autant plus que, comme on le constate aujourd'hui et je ne le dis pas ici, juste à titre de jeter des fleurs, non mais pour rendre hommage. Comme vous avez bien voulu le dire au début de notre discussion, je prétends avoir eu une longue expérience dans le domaine du multilatéralisme et cela a toujours été pour moi un honneur et un plaisir et une satisfaction de travailler avec les institutions, les secrétariats, le leadership au niveau des Nations Unies et de ses différentes agences parce que leur contribution est fondamentale aussi et il faudrait la respecter et il faudrait souvent être à l'écoute pour développer au mieux le multilatéralisme.

Francesco Pisano

Je vous remercie de cette phrase qui me semble parfaite pour presque conclure notre épisode d'aujourd'hui. Mais avant de conclure, je me demande s'il y a une chose que vous voulez que notre public retienne du rôle du Maroc au sein des Nations Unies, des rêves du Maroc pour la communauté internationale et pour le développement du multilatéralisme, ça serait quoi ?

Ambassador Omar Zniber

Encore une fois, je crois que le plus important aussi, c'est le rapprochement culturel, et le Maroc joue un rôle, c'est ça le rêve du Maroc, c'est d'être ce pays phare, ce pays qui se sent avoir une vocation essentielle dans ce domaine, un pays imprégné de tolérance, un pays imprégné de mesure, et qui le vit. Et je pense que nous n'accordons pas l'importance voulue à cet aspect-là de culture de vivre ensemble parce que on constate aujourd'hui les montées des différents radicalismes dans le monde. Vous avez tout à l'heure dit qu'il y a autour de multilatéralisme un certain scepticisme fort qui l'entoure et on l’entend de plus en plus. Mais au même temps, je pense que nos diversités doivent être une richesse et ne doivent pas nous éloigner.

Le cœur du message du Maroc, c'est ce message-là, à travers ses institutions, à travers le comportement et les décisions et les stratégies désignées par ses leaders, le Maroc, aujourd'hui est fier, fier, de ce qu'il est d'abord sur le plan culturel, sur le plan civilisationnel. Comme j'ai dit tout à l'heure, nous sommes l'une des rares constitutions, je ne veux pas particulariser le Maroc. Je dis des choses, des faits établis, réels. Nous sommes un pays ayant l'une des rares constitutions qui parlent de ces confluences historiques, civilisationnelles et religieuses, et ça c'est très important. Voilà.

 Francesco Pisano

C'est un très beau message. Excellence Ambassadeur Omar Zniber, Représentant Permanent du Royaume du Maroc aux Nations Unies à Genève et d'autres organisations internationales, je vous souhaite tout le bonheur du monde, je vous souhaite beaucoup de succès dans votre travail et je vous remercie pour avoir pris le temps d'être avec nous sur notre podcast.

 Ambassador Omar Zniber 

Merci, à vous aussi. Merci.

 Alma Rinaldi

Nous espérons que vous avez apprécié cette conversation avec l'Ambassadeur du Royaume du Maroc. Vous trouverez des liens vers les ressources utilisées ainsi que la transcription de cet épisode dans les notes de l'émission. Si cet épisode vous a plu, nous aimerions que vous preniez un moment pour vous abonner, nous évaluer et nous laisser vos commentaires sur Apple, Spotify ou Podbean, ou pour partager l'épisode avec vos connaissances. N’hésitez pas à nous faire part de vos idées pour les prochains épisodes. Jusqu'à notre prochaine rencontre, prenez soin de vous.


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